La profession d’architecte ne cesse d’évoluer. Pour Marek Kisielewicz, Benoît Jacques et Thibaut Piraux, architectes associés et administrateurs chez Altiplan, la durabilité est devenue le principal enjeu du métier.
Dans notre activité, les démolitions complètes de bâtiments se font de plus en plus rares ; nous combinons le neuf et l’ancien.
Quelle importance accordez-vous à la durabilité ?
Benoît Jacques : « Pour tout projet de construction ou de rénovation, elle constitue l’enjeu majeur dans notre métier. Elle implique de multiples aspects : gestion du territoire dans son ensemble, impact de la construction, maintien de la biodiversité, des surfaces vertes agricoles et en ville, efficacité énergétique, gestion de l’eau, perméabilité des sols, circularité, etc. De nos jours, notre secteur représente une part considérable des émissions de CO2. Le Green Deal impose un défi de taille : diminuer ces émissions à 55 % d’ici à 2030 et atteindre la neutralité en 2050. Dès lors, nous intégrons très tôt tous ces aspects de durabilité dans nos projets, bien avant l’introduction des demandes de permis d’urbanisme. »
Marek Kisielewicz : « Ceci explique aussi que par rapport à la construction de bâtiments neufs, la part de rénovations ou de réaffectations de bâtiments existants est devenue aujourd’hui très importante. Dans notre activité, les démolitions complètes de bâtiments se font de plus en plus rares ; nous combinons le neuf et l’ancien. »
Thibaut Piraux : « Cet aspect est vraiment l’ADN de notre bureau d’architecte. C’est le cas par exemple dans notre projet de réaffectation du site industriel de Jupille, un bâtiment où l’on brassait de la bière autrefois. Il y a quelques années, un promoteur a décidé de reconvertir ce chancre, principalement en logements. Nous avons analysé les points forts et les points faibles du site en termes de bâti, listé les bâtiments historiques ayant un nouveau potentiel et décidé de ce qui devrait laisser de la place à des espaces bâtis ou non bâtis plus qualitatifs. »
Quelles sont les autres spécificités de ce projet ?
B. J. : « Commencé en 2021, ce projet, qui s’appelle ‘Lift-Ô-Loft’, est aujourd’hui en phase de permis. Les premières rénovations et constructions devraient se situer dans le milieu de 2025. À terme, le bâtiment comptera une petite centaine de logements, mais aussi des espaces de bureaux, des espaces culturels et des espaces extérieurs communs pour tous les habitants. »
T. P. : « Nous réaménagerons aussi en parkings les premiers niveaux situés face à la rue de Visé, dans la partie basse du site. Sur la dalle du bâtiment qui se trouve au-dessus de ces parkings, nous créerons un jardin suspendu. Nous voulons rendre le site accessible aux habitants de Jupille ; ils pourront s’y balader et se réapproprier les lieux. Sur les deux premiers niveaux du bâtiment, il y aura des bureaux et un lieu dédié à des expositions ; ici, nous laisserons quelques anciennes cuves à bière en guise de décor. »
Qu’en est-il des aspects liés à la durabilité?
M. K. : « Au niveau énergétique, nous profitons d’une source en-dessous du bâtiment ; nous allons la retraiter en géothermie afin d’obtenir une base de chauffe pour l’entièreté des fonctions qui seront développées. Nous compléterons cela avec des pompes à chaleur, de telle à sorte à apporter l’appoint nécessaire pour la chauffe des espaces. De manière globale, nous avons vraiment la volonté de profiter de ce tout qui se trouve déjà sur le site afin de développer des techniques écoresponsables. »
T. P. : « C’est aussi le cas des matériaux. Par exemple, les parements en briques seront démontés et réutilisés, tandis que l’isolation en liège sera récupérée pour être utilisée dans de nouvelles chapes isolantes. Par ailleurs, sur les fondations de l’ancienne Tour InBev, on rebâtit une nouvelle tour de logement. En outre, nous profitons de l’imposante structure béton de la cannetterie pour créer des lofts spacieux. Vu que la structure peut accueillir des charges importantes, nous y avons intégré un monte-charge, qui permet aux personnes de pouvoir monter des objets lourds et encombrants dans les espaces de vie … d’où le nom ‘Lift-Ô-Loft’ »