La Belgique fait figure de meilleur élève sur la scène européenne pour le recyclage des déchets d’emballages industriels. Même si elle n’a pas à rougir des progrès engendrés, elle pourrait toutefois encore progresser en matière de circularité des plastiques. Pour cela, comme l’explique Francis Huysman, Managing Director de Valipac, il faut s’attaquer à plusieurs fronts.
Où la Belgique se situe-t-elle en matière de recyclage des emballages industriels ?
Francis Huysman : « La situation est globalement très positive. Nous atteignons 92,4 % de taux de recyclage pour les emballages industriels, avec des scores très élevés pour le carton, le métal et le bois. Le plastique fait moins bien, mais avec un taux de 62 % qui reste plus haut que celui des autres pays de l’Union européenne. Ce moindre score est lié au fait que les PME ont tendance à moins trier les films d’emballage en plastique, pensant qu’un tel effort ne vaut pas la chandelle pour à peine quelques films par semaine. Malheureusement, ces petites quantités, multipliées par quelque 50.000 PME, deviennent vite de très grandes quantités… qui sont envoyés directement à l’incinération ! »
Que déployez-vous pour renforcer notre score ?
F. H. : « Pour améliorer le tri des déchets d’emballages industriels, nous avons développé depuis longtemps un système de primes. La prime recyclage pour le plastique est de 30 euros par tonne de plastique triée, ce qui est intéressant quand on génère de grandes quantités. Pour les entreprises qui génèrent de petites quantités, nous avons mis en place un système de prime distinct pour l’achat de sacs en plastique, qui vont de 200 à 600 litres selon le collecteur de déchets. Encore trop peu usité, ce système de sacs en plastique n’engendre pas de coûts logistiques supplémentaires, car ces sacs sont généralement enlevés lors de la vidange du conteneur papiers- cartons. »
Avec un taux de 62 %, le recyclage des emballages plastique reste plus haut en Belgique que celui des autres pays de l’Union européenne.
À vous entendre, des efforts de sensibilisation sont encore nécessaires auprès des entreprises…
F. H. : « Effectivement. Et nous nous y employons, non seulement en faisant connaître ce système au plus grand nombre, mais également de manière ciblée. Nous disposons en effet de données sur le comportement de tri des entreprises ; nous pouvons identifier quelles entreprises trient quelles quantités et quels types de déchets. Chaque année, nous contactons les entreprises qui ne trient pas les films plastique pour leur proposer de tester gratuitement le tri de ces déchets avec un kit de démarrage. C’est un travail de longue haleine, mais il porte ses fruits ; un bon millier d’entreprises commandent ce kit chaque année et continuent ensuite systématiquement le tri. »
Quelles sont vos autres actions ?
F. H. : « Un autre volet sur lequel nous insistons est la relocalisation du recyclage. Actuellement, 60 % des déchets plastiques triés par les entreprises sont recyclés en dehors de l’Europe : 20 % en Turquie et 40 % dans le reste de l’Asie. Vu la faible demande pour le plastique recyclé, l’Europe n’a pas développé jusqu’à présent suffisamment de capacités de traitement pour cette matière. Dès lors, pour stimuler cette demande, Valipac a mis en place ici aussi un système de primes, destiné cette fois aux entreprises qui utilisent du film plastique recyclé, par exemple pour entourer leurs palettes. La prime est ici de 50 euros par tonne de matière recyclée ; nous envisageons même de la faire passer à 100 euros pour encore plus d’impact. »
Le recours au plastique recyclé souffre-t-il encore d’a priori négatifs ?
F. H. : « Oui et à tort. Sa couleur grisâtre rend les utilisateurs réticents. Cette couleur est due au fait que le plastique coloré ou teinté est difficilement recyclable en un plastique transparent. Nous incitons dès lors les entreprises à toujours utiliser du film complètement transparent s’il n’est pas encore recyclé pour pouvoir refaire un autre un film transparent par la suite. Pour l’heure, contrairement à certaines idées reçues, le plastique recyclé grisâtre est de toute aussi bonne qualité et tout aussi résistant que la matière vierge. Nos tests dans des laboratoires agréés l’ont démontré. Un autre élément qui joue en défaveur du plastique recyclé est son prix plus élevé que le plastique vierge. C’est pourquoi, là encore, la prime offerte a pour objectif de compenser la différence de prix. »
L’exportation de déchets de plastique de l’Europe vers l’Asie sera interdite à partir de 2026 : des solutions devront donc impérativement être trouvées au niveau européen.
À terme, il faudra aussi renforcer nos capacités de traitement du plastique sur le sol européen…
F. H. : « C’est tout à fait exact. Là aussi, nous offrons une prime, en l’occurrence aux collecteurs de déchets qui choisissent des destinations au sein de l’Union européenne. Nous avons l’espoir que de nouvelles usines de recyclage de plastique verront le jour, notamment en Belgique où il en existe déjà quatre ou cinq. Mais, de toutes façons – et c’est une bonne nouvelle – l’exportation de déchets de plastique de l’Europe vers l’Asie sera interdite à partir de 2026. Des solutions devront donc impérativement être trouvées au niveau européen pour les centaines de milliers de tonnes de déchets plastiques – dont 25.000 tonnes de Belgique – qui partent annuellement vers l’Asie. Dans le même temps, ce sera une belle opportunité de développement économique pour l’Europe… sans oublier pour autant qu’il faut aussi continuer à inciter les entreprises à réduire leur consommation d’emballages plastiques. »