Dans un contexte de taux d’intérêt structurellement bas, investir dans l’immobilier reste une très bonne opération. Serge Fautré, Président de l’Union professionnelle du secteur immobilier (UPSI) fait le point sur l’évolution du secteur et nous prodigue quelques conseils.
Texte : Philippe Van Lil – Photos : Kris Van Exel
Quel regard portez-vous sur le monde de l’investissement en Belgique ?
« Il est dommage que chez nous, de par nos mesures fiscales ou l’image que l’on eut donné trop souvent, on stigmatise autant l’investissement à risque. Le placement en actions est trop souvent considéré comme un acte capitalistique risqué et donc à éviter. Or, les actions en bourse sont avant tout une source de financement pour le développement de nos entreprises, ce qui devrait plutôt nous réjouir. »
« Au même titre que les portefeuilles d’assurances, les actions sont pénalisées et on peut également déplorer le peu de fonds de pension dont nous disposons en Belgique, alors que dans d’autres pays, ils représentent une source majeure d’approvisionnement en capital-risque. »
Est-ce également vrai pour l’immobilier ?
« Si l’investissement en actions est donc peu privilégié par rapport aux pays voisins, le Belge investit proportionnellement davantage directement dans un bien immobilier physique ou par le biais de sociétés immobilières car il cherche un supplément de rendement par rapport aux marchés obligataires qui, aujourd’hui, fournissent un rendement quasiment nul. »
Comment se porte notre marché immobilier ?
« Nous connaissons une croissance certaine liée à la hausse démographique. Nous avons également un renouvellement nécessaire du parc en raison de son ancienneté. Les appartements neufs offrent plus de confort et une performance énergétique remarquable, indispensable pour contribuer à des économies d’énergie. »
« Le prix de l’immobilier est en outre à un niveau nettement moins élevé que dans d’autres marchés européens. Le souci principal est néanmoins de garder un lien raisonnable entre le prix de l’immobilier et la capacité contributive, c’est-à-dire la capacité de revenus du Belge. Contrairement à d’autres pays, nos salaires réels ont peu augmenté. »
« Le crédit hypothécaire nécessaire à l’acquisition d’un bien immobilier doit donc aussi pouvoir être supporté par un ménage de deux personnes avec des revenus moyens. Pour l’instant, nous sommes toujours dans cet équilibre. Ceci explique qu’aujourd’hui, les produits immobiliers résidentiels restent attrayants pour les investisseurs. »
Quelle est la rentabilité moyenne d’un bien ?
« La plupart des projets offrent une rentabilité de l’ordre de 3 à 4 %, qui bénéficie en outre normalement de l’indexation des loyers. Toutefois, tout investisseur doit être conscient que lorsqu’il vieillit, un bien immobilier fait l’objet d’obligations d’entretien ou de rénovation. »
« Malgré tout, vu les prix d’achat relativement abordables par rapport aux standards européens, l’immobilier belge conserve un potentiel appréciable pour des actifs bien localisés. Cette appréciation a bien sûr un caractère spéculatif et donc incertain. »
L’immobilier résidentiel constitue-t-il toujours un « bon plan » ?
« Oui, absolument, et ce pour deux raisons. Un : la législation successorale permet une transmission à des taux réduits, entre autres via la donation. Deux : la propriété immobilière revêt toujours un caractère de stabilité et d’apaisement dans une société parfois en butte à des évolutions sociologiques. »
Vu les prix d’achat relativement abordables par rapport aux standards européens, l’immobilier belge conserve un potentiel appréciable pour des actifs bien localisés.
« Actuellement, c’est surtout le résidentiel urbain qui a la cote, notamment parce que beaucoup de pensionnés reviennent en ville, où la mobilité est plus facile et la vie sociale plus intense. Cette situation a pour corolaire qu’il est indispensable d’accroître l’offre, d’accorder davantage de permis, de densifier les villes dans un certain nombre de quartiers. En revanche, beaucoup de villas hors des villes sont à vendre. »
On se dirige aussi vers des appartements plus petits qu’auparavant…
« Effectivement ! L’appartement plus petit répond à plusieurs tendances. La première est que, par manque de temps, les gens mangent de plus en plus à l’extérieur, où il trouve également une vie sociale trépidante. »
« L’autre est que les grandes familles sont moins nombreuses qu’autrefois. Enfin, on préfère souvent investir dans des appartements moins chers. À cet égard, il faut toutefois se montrer très prudent : chaque individu a tout de même besoin d’un espace vital minimum… »
« Résoudre systématiquement le problème de l’équation financière par une course à la réduction des espaces ne me paraît pas très sain ! »
Un dernier conseil aux investisseurs potentiels ?
« Pour investir en immobilier, il faut de bons conseillers et opérer des choix intelligents. Je suis par exemple surpris de voir qu’en France, on propose à des particuliers d’acheter des morceaux d’hôtels ou de maisons de repos avec, parfois, des avantages fiscaux à la clé. Si quelqu’un souhaite détenir de tels actifs, relativement complexes, mieux vaut en laisser la gestion à des professionnels. »
« C’est également vrai pour les bureaux. Dans le résidentiel, c’est probablement un peu plus facile car la taille est mieux gérable. Mais elle doit être bien accompagnée ; travailler avec des contreparties solides reste indispensable. »