Installée à Gaurain-Ramecroix, la Compagnie des ciments belges (CCB) est, avec ses quelque 500 collaborateurs, un poids lourd de l’économie wallonne. Face à l’urgence climatique, son directeur général, Eddy Fostier, dévoile une stratégie ambitieuse : décarboner massivement pour maintenir l’emploi et la production en Europe. Un défi industriel colossal.

Eddy Fostier
directeur général de la Compagnie des ciments belges (CCB)
Pour CCB, filiale du groupe italien Cementir Holding, le béton reste un matériau d’avenir, indispensable pour le logement et aux grandes infrastructures durables comme le ferroviaire ou la gestion de l’eau. Toutefois, avec une capacité de 2 millions de tonnes de ciment, l’usine doit s’attaquer à ses trois sources d’émissions : la combustion, la décarbonation du calcaire et l’électricité.
Pour décarboner, la stratégie de l’entreprise repose sur une transformation radicale de son outil industriel. « Le premier axe est l’abandon des combustibles fossiles », nous explique Eddy Fostier. « L’entreprise investit dans un précalcinateur et modifie ses brûleurs pour consommer essentiellement de la biomasse, notamment via des partenariats d’économie circulaire avec des acteurs locaux comme l’intercommunale Ipalle. »
Pour couvrir une demande qui va exploser, CCB projette l’installation de 8 éoliennes capables de fournir 100.000 MWh par an, soit un tiers de nos besoins actuels.
Le deuxième axe est électrique : « Pour couvrir une demande qui va exploser, CCB projette l’installation de 8 éoliennes capables de fournir 100.000 MWh par an, soit un tiers de nos besoins actuels. » Mais le véritable « game changer » reste le troisième axe : la captation du CO2. « Nous projetons de construire une unité pour capter le carbone à la cheminée, le purifier et l’injecter dans le réseau Fluxys pour être enfoui en mer du Nord ou réutilisé par l’industrie chimique. »
Un mur d’investissements et d’obstacles
Cette transition a un coût astronomique : plusieurs centaines de millions d’euros, auxquels s’ajoute un accroissement considérable des coûts opérationnels, notamment liés à l’électricité et au transport du CO2. Pour éviter de répercuter cette hausse sur le client final et le secteur de la construction, CCB compte sur le soutien public de la Wallonie, via le Fonds pour une transition juste, et de l’Europe, via l’Innovation Fund.
« Mais l’argent ne suffit pas », souligne Eddy Fostier, qui lance un appel aux autorités wallonnes pour une simplification administrative et une accélération des permis. Il pointe aussi l’urgence de sécuriser les infrastructures : « Sans la réalisation de la Boucle du Hainaut pour l’apport électrique et le déploiement rapide du réseau de transport de CO2, la décarbonation restera une utopie. »