Il y a 13 ans, la brasserie Lindemans est passée entre les mains de la nouvelle génération. C’est alors que les cousins Dirk et Geert Lindemans ont commencé à écrire leur propre chapitre de cette épopée familiale à succès. Le choix pour un transfert dans la famille s’est avéré être le bon.
Texte : Sijmen Goossens – Photos : privé
Lorsque les pères de Dirk et Geert Lindemans ont confié en 2006 leur entreprise à leurs fils, la décision ne fut pas prise du jour au lendemain. « En dépit de notre échelle, Lindemans reste une entreprise familiale », selon Dirk.
« Depuis 1822, niveau d’authenticité élevé, processus de production spécifiques et savoir-faire transmis de génération en génération sont les caractéristiques qui ont permis à cette entreprise de se forger une identité propre, avec fruit. La croissance et l’exportation de nos bières lambics traditionnelles nous ont incités au cours de ces dernières décennies à viser sans cesse un perfectionnement poussé, dans lequel recherche, technique et structures d’entreprise ont été continuellement optimisés. »
Deux ans avant le transfert, nos pères reçurent une offre de rachat lucrative de la part d’une grande brasserie belge.
« C’est cette croissance que nous voulions protéger et ensuite développer. Deux ans avant le transfert, nos pères reçurent une offre de rachat lucrative de la part d’une grande brasserie belge. Après mûre réflexion, ils décidèrent de la décliner. »
« Il aurait bien entendu été plus simple d’accepter cette offre, mais dans l’intervalle, Geert et moi étions actifs dans l’entreprise depuis plus de douze ans. La relève était donc prête. Rapidement, nous en sommes arrivés à la conclusion qu’il serait illogique de vendre cette belle entreprise florissante. »
Matière sensible, encadrement expérimenté
Un transfert dans la famille induit quelques facteurs très spécifiques dont il faut tenir compte. Un bon encadrement n’est pas un luxe superflu, mais plutôt une condition au succès.
Dirk : « Rapidement, plusieurs questions complexes, pressantes, se sont posées. Comment répartir les actions ? Qui veut quitter l’entreprise et qui veut y rester actif ? Avons-nous besoin de capital externe ou pouvons-nous y parvenir sans ? »
« Pour apporter des réponses à toutes ces questions, nous avions besoin d’un tiers objectif et expert. Le Prof. Jan Delcour, président de notre Conseil d’administration, nous a mis en contact avec un bureau d’experts-comptables qui nous a accompagnés lors de chaque étape. Nous avons dès lors pu racheter les parts de la famille de manière satisfaisante pour chacune des parties, sans faire appel à du capital externe par le biais de banques. Nous avons pu déterminer le remboursement et les intérêts et le paiement fut réalisé en huit ans au lieu de dix, notamment grâce aux bons chiffres réalisés. »
Une nouvelle voie
« Bien entendu, nous devions également exploiter l’expérience et la sagesse de la génération précédente tout en empruntant une nouvelle voie, sans générer trop de conflits au niveau de la participation au processus de décision. Vous serez peu surpris d’apprendre que l’ancienne génération avait tendance à être plus conservatrice. Geert et moi avions également, surtout au début, quelques divergences d’opinion. C’est la raison pour laquelle nous organisons chaque mois une réunion d’administration dans laquelle Jan Delcour joue le rôle de président, d’expert et de modérateur. »
« En outre, nous pouvons compter sur un vaste réseau professionnel pour obtenir des conseils professionnels. De cette façon, les décisions sont toujours prises dans l’intérêt de l’entreprise, sans être dictées par des émotions. »
Poursuivre la croissance d’une entreprise florissante
Dirk : « Notre brasserie n’a cessé de croître. Cependant, certains obstacles spécifiques sont apparus pendant la période du transfert, nécessitant une attention particulière. L’année 2006, précédant la crise bancaire, était marquée par un contexte économique loin d’être idéal. »
« Dans l’intervalle, nombreux sont ceux qui commencèrent à s’y intéresser et à manifester un appétit pour les bières fruitées. On parla même de « guerre des bières fruitées ». Notre succès s’explique surtout par notre vision de l’exportation : nous nous sommes montrés ouverts à divers marchés mondiaux. Et nous y avons consacré des investissements de taille. »
Il ne fut guère aisé d’exploiter l’expérience et la sagesse de la génération précédente tout en empruntant une nouvelle voie.
« Il y a clairement de bonnes opportunités en Belgique, mais c’est surtout à l’étranger que le potentiel de croissance est considérable. Le marché américain est, en dehors de l’Europe (avec la France en tête), notre principal client, mais l’Asie et la Russie recèlent également de plus en plus de perspectives favorables. »
« C’est en Chine que nous enregistrons notre croissance la plus rapide. L’Amérique du Sud est normalement un marché de croissance, mais la situation politique instable actuelle au Brésil en provoque un léger repli. Miser de manière conséquente sur l’optimisation et l’automatisation nous permet de répondre à la demande croissante. »
« Nous faisons énormément de choses nous-mêmes, mais notre croissance nous a poussés à attirer des compétences et du savoir-faire spécifiques, ce qui nous a permis de rester plus que compétitifs », en conclut Dirk.