Une bonne stratégie de Credit Management s’avère plus que jamais indispensable pour les entreprises dans le contexte actuel. Entretien avec Xavier Dufeil, Senior Risk Underwriter chez Coface.
Texte : Olivier Clinckart
En quoi la crise du coronavirus renforce-t-elle l’idée que l’assurance-crédit doit avoir une place en tant que stabilisateur économique dans notre société ?
Xavier Dufeil : «Environ 25 % des faillites d’entreprises sont dues à une créance impayée. L’assureur-crédit permet de couvrir les sociétés ayant un certain niveau de chiffre d’affaires et qui accordent des délais de paiement à leurs clients. Le crédit inter-entreprises représente à peu près la moitié du financement externe des sociétés, à jeu égal avec le financement bancaire. Les banques prennent des garanties lorsqu’elles prêtent de l’argent. Les fournisseurs doivent également sécuriser leurs créances.
Et ce crédit inter-entreprises est facilité par les assureurs-crédits, les fournisseurs peuvent accorder plus sereinement des délais de paiement sur leur marché domestique comme à l’export lorsqu’ils sont couverts pour ce risque. Sans assurance-crédit, le nombre de faillites exploserait. De même, les sous-traitants de la société faillie et ses fournisseurs seraient entraînés dans le même effet domino. Ainsi, à titre d’exemple, un groupe comme Coface assure environ 500 milliards d’euros de garantie et malgré la crise actuelle, il n’y a pas eu d’érosion des garanties assurées. »
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En 2020, on a constaté une baisse de 30 % des faillites, mais ce chiffre plus faible que d’habitude est principalement dû aux mesures étatiques.
Qu’en est-il du nombre de faillites en Belgique ?
X. D. : « Ces dernières années notre pays enregistrait à peu près 10.000 faillites par an, un chiffre généralement stable. Toutefois, en 2020, on a constaté une baisse de 30 % des faillites, ce qui peut sembler paradoxal compte tenu du confinement et de l’économie tournant au ralenti. Mais ce chiffre plus faible que d’habitude est principalement dû aux mesures étatiques.
Néanmoins, une série de mesures prennent fin au 30 juin et au 30 septembre 2021, on s’attend donc logiquement à une reprise à la hausse des faillites. Les états ont accru leur endettement cette année, il en va de même pour les entreprises qui ont maintenu leur trésorerie par de la dette. Il en découle une fragilisation des entreprises. Cette pression sur leur trésorerie va s’accroître avec la reprise, le restockage et l’augmentation de leur besoin de fonds de roulement. »
Tout cela démontre donc d’autant plus l’importance d’avoir une bonne stratégie de Credit Management ?
X. D. : « Un Credit Manager se base sur les publications de chiffres à sa disposition, à savoir actuellement les bilans de 2019, ce qui n’a évidemment plus aucun sens au vu de ce que nous traversons. Il est donc plus qu’utile de recourir à un assureur-crédit pour sous-traiter son Credit Management.
Externaliser la fonction de Credit Manager auprès d’une compagnie d’assurance-crédit permet non seulement de minimiser ses coûts fixes de personnel, mais surtout de bénéficier des services d’experts et d’outils technologiques (plateforme online et application mobile). Il y a la qualité de nos informations et la prévention des risques mais aussi l’indemnisation en cas d’impayés et la forte valeur ajoutée de notre recouvrement international. »
On assiste à un renforcement de la collaboration entre l’assuré, qui connaît ses clients, et l’assureur, qui dispose d’informations confidentielles.
L’assureur-crédit dispose donc d’une vision plus large ?
X. D. : « En effet. L’assureur-crédit entretient des contacts privilégiés avec de nombreux assurés (les fournisseurs) et de nombreux débiteurs (les acheteurs). Il intègre dans ses analyses, des bilans récents, les carnets de commande, le plan de trésorerie et autres indicateurs conjoncturels. De plus, du fait du Stop & Go de l’économie, le suivi de risques annuel est passé en suivi trimestriel (en relation étroite avec l’entreprise). Une société seule peut difficilement avoir les ressources pour s’en occuper elle-même. »
Dans cette optique, l’intelligence artificielle joue un rôle crucial pour obtenir une information qualitative ?
X. D. : « La professionnalisation de notre métier est constante, mais la crise a fait effet d’accélérateur. Chez Coface, nous consentons des investissements massifs pour développer notre IA, ce qui nous permet de mieux monitorer nos risques grâce à des systèmes d’alertes, par exemple lors d’une évolution négative sur la rentabilité. Une série de bons risques peuvent être arbitrés par l’intelligence artificielle. Les petits risques peuvent l’être aussi, lorsqu’il n’est pas nécessaire de disposer d’une réelle valeur ajoutée humaine.
De la sorte, l’expertise humaine peut se consacrer entièrement aux risques complexes et surtout au service client. Il faut pouvoir garantir un service de qualité à la clientèle qui a de plus en plus besoin de retour, d’explications, d’échanges. On assiste à un renforcement de la collaboration entre assurés et assureurs. L’assuré est sur le terrain, connaît personnellement ses clients et dispose d’informations que l’assureur-crédit n’a pas. En revanche, l’assureur-crédit dispose d’une base de données avec des expériences de paiement, des informations confidentielles, une vue sur les carnets de commandes… Mises en relation, ces deux connaissances distinctes permettent donc de cibler au mieux les risques. »
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