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Réduire l’empreinte immobilière du parc immobilier de l’État

À l’exception de certains départements comme la Défense, la Régie des Bâtiments est responsable de la gestion du portefeuille immobilier de l’État belge. Comme le détaille Laurent Vrijdaghs, son administrateur général, cette mission concerne des millions de mètres carrés de surfaces, mais aussi des objectifs climatiques stricts.

Quels sont vos objectifs en matière environnementale ?

Laurent Vrijdaghs : « Dans le cadre du Plan national Énergie-Climat de 2019, l’État belge s’est fixé des objectifs de réduction encore plus ambitieux que ceux de la Commission européenne. Cela nous impose de réduire nos émissions de CO2 de moitié d’ici à 2030 et totalement d’ici à 2040. Pour l’Europe, la neutralité carbone est fixée à l’horizon 2050. Il y aura quelques exceptions pour certains bâtiments patrimoniaux. »

De quels leviers disposez-vous pour y parvenir ?

L. V. : « Notre levier principal, avec un impact relativement radical, est de réduire notre empreinte immobilière : moins on a de bâtiments, moins on a de consommations d’énergie et d’émissions. Nous avons entrepris cette évolution dès 2012, pour des motifs écologiques et énergétiques, mais aussi pour rationaliser notre portefeuille immobilier, trop vaste par rapport au nombre d’agents publics à héberger. On est ainsi passé d’une surface globale d’environ 8 millions de mètres carrés il y a une quinzaine d’années à 6,7 millions aujourd’hui. D’ici aux dix prochaines années, l’objectif est d’en réduire encore un million supplémentaire. »

Comment ferez-vous pour réduire l’empreinte des très vieux bâtiments ?

L. V. : « Il faut bien avouer qu’à cet égard, la situation est dramatique. D’anciens palais de justice ou musées, par exemple, devraient être modernisés, mais certains sont parfois classés et ne pourront donc jamais devenir passifs. La Régie des Bâtiments avait pris conscience du problème déjà dans les années 1980, mais nous sommes encore très loin de l’avoir résolu. À l’époque, des experts techniques avaient survolé les bâtiments publics dans un hélicoptère de la gendarmerie ; munis d’une caméra thermique, ils en avaient mesuré les déperditions de chaleur au niveau des toitures. Ceci a constitué une bonne source d’informations pour savoir où agir en priorité. En complément, un audit énergétique du portefeuille immobilier géré par la Régie des Bâtiments va être réalisé ces quatre prochaines années. Comme nous ne disposons pas des moyens humains pour le réaliser nous-mêmes, nous avons lancé en 2022 un marché public afin de désigner des auditeurs qui le seront dans les tous prochains jours. Plus globalement, pour couvrir toutes nos tâches, nous manquons actuellement de moyens budgétaires et de 229 équivalents temps pleins sur un total stratégique de 967 ETP ; ils seraient nécessaires pour accomplir correctement nos missions. »

L’État belge s’est fixé pour objectif de réduction de ses émissions de CO2 de moitié d’ici à 2030 et totalement d’ici à 2040.

Comment concilier ce manque de moyens avec vos objectifs ?

L. V. : « Nous allons devoir établir des priorités et être créatifs. Il s’agira notamment de nous entourer de partenaires publics, comme la Société fédérale de participation à l’investissement (SFPI), et de partenaires privés dans le cadre de partenariats publics-privés (PPP) pour les travaux de rénovation et d’efficacité énergétique. Ce mécanisme des PPP a déjà permis de lancer la construction d’une dizaine de prisons sur dix ans. Sans cela, on ne serait parvenu à en construire que deux. Cela étant, nous procédons tout de même à des travaux d’isolation et de rénovation des toitures et châssis d’anciens bâtiments. C’est par exemple déjà le cas au Cinquantenaire et ce le sera bientôt pour le Palais de Justice et le Palais royal de Bruxelles. »

N’y a-t-il pas aussi un problème de disponibilité de bâtiments qui sont aux normes actuelles ?

L. V. : « Très clairement, oui ! Quand on a cherché par exemple une implantation pour la Sûreté de l’État et le Centre de crise en 2021, on n’a pas trouvé beaucoup de possibilités. De plus, durant la prochaine décennie, certains contrats de location importants arriveront à échéance. C’est notamment le cas des grandes tours de bureaux de la Région bruxelloise : la Tour des Finances, Cité-Atrium, WTC III, etc. Certaines sont vraiment de vieux tromblons par rapport aux normes actuelles. Nous devrions donc disposer d’autres bâtiments qui rencontrent de meilleures normes énergétiques. Or, en ce moment, cette offre de bâtiments n’est pas là, tandis que la demande est énorme, y compris en provenance du secteur privé. »

Que faire dès lors ? 

L. V. : « Je lance un appel très clair aux secteurs privé et publics. Le privé doit se réveiller pour développer cette offre, tandis que les autorités régionales et locales, responsables de l’octroi des enquêtes publiques et des permis de bâtir, doivent accélérer les choses. Il n’est plus possible de devoir attendre de 3 à 5 ans pour disposer d’un nouveau bâtiment. Aujourd’hui, il est devenu plus difficile d’obtenir un permis que de construire un bâtiment. Ce n’est pas normal ! Pour certains, l’introduction de recours pour s’opposer à un permis est presque devenue un sport. »

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