Fer de lance de notre économie, le secteur des sciences du vivant – pharma, biotech, medtech – est victime de son succès : il connaît une pénurie de main-d’œuvre importante. Comme le détaille Valérie Roels, Fondatrice et General Manager de Cap4HR, des solutions efficaces sont néanmoins déployées pour attirer comme pour retenir les talents.
Quelle est la situation actuelle sur le front de l’emploi dans le secteur des life sciences ?
Valérie Roels : « Nous sommes toujours dans le cadre d’une véritable ‘guerre des talents’. Nous manquons notamment d’ingénieurs et de profils de haut niveau avec une expérience en production biopharma, en a aires réglementaires ou en assurance qualité. L’industrie évolue, mais les ressources humaines font défaut. Il est plus que temps d’enclencher la vitesse supérieure en termes de formation et de recrutement, d’autant plus que le BioPark de Charleroi a l’ambition de passer des 3.500 travailleurs actuellement à plus de 10.000 en 2030. »
Quelles solutions préconisez-vous ?
V. R. : « Chez Cap4HR, nous accompagnons les PME et les startups dans leur stratégie RH afin qu’elles maintiennent leurs collaborateurs le plus longtemps possible. Pour cela, nous recommandons de mettre en place des processus d’évaluation des travailleurs qui peuvent aboutir à des plans de formation et de développement personnel à une montée en puissance des compétences.
Aujourd’hui, afin de pouvoir évoluer, les jeunes sont très réceptifs au feedback de leur hiérarchie. Les sociétés craignent malheureusement encore trop souvent de donner ce feedback, de peur qu’il soit pris de façon négative. Pour les collaborateurs, c’est pourtant un atout majeur afi n d’avancer et de remédier à certaines lacunes. »
Et ce ne sont pas les possibilités de formation qui manquent…
V. R. : « Effectivement. Outre le fait que bon nombre d’entreprises forment elles-mêmes leur personnel, il existe à Bruxelles et en Wallonie pas moins de six universités – dont le récent campus de Charleroi -, ainsi que plusieurs hautes écoles et centres de formation. Aptaskil, le centre de formation de l’industrie chimique et pharmaceutique, va d’ailleurs développer une nouvelle antenne à Liège, tandis que HeLSci, le centre de formation de l’ULB, présent sur le site de Gosselies, élargit son o re, notamment pour les demandeurs d’emploi et pour les travailleurs en formation continue. En outre, l’European Biotech Campus, un centre de formation couplé à un accélérateur d’entreprises verra le jour en 2025 à Gosselies. Pour attirer les jeunes vers les filières scientifiques et techniques, il faut sensibiliser, dès le secondaire, avec une information bien plus claire sur les métiers de pointe en pénurie de main-d’œuvre. »
Quels autres leviers actionnez-vous encore ?
V. R. : « Il est essentiel que les collaborateurs trouvent un sens à leur travail. Dans notre secteur du pharma-biotech-medtech, cela coule de source ; la santé et le bien-être des êtres humains sont les moteurs de base qui incitent les jeunes à devenir des scientifiques et à travailler dans nos entreprises. Toutefois, le bienêtre des collaborateurs sur leur lieu de travail est tout aussi essentiel, en particulier dans le contexte de pénurie de main-d’œuvre et de concurrence entre entreprises du secteur pour attirer des talents. Ici, nous préconisons notamment que les managers d’équipe soient d’ailleurs coachés pour accompagner leurs collègues dans cette optique de bien-être. »
La volonté d’aller de l’avant est-elle partagée par les autres acteurs de votre secteur ?
V. R. : « Oui, il y a un réel changement significatif, que ce soit de la part de l’industrie, de fédérations comme Essenscia ou BioWin, des parcs scientifiques de Liège et Charleroi, ou encore du Forem. Il y a une véritable mise en commun de nos atouts et une volonté de collaborer pour relever les défi s du secteur en matière de talents, mais aussi dans bien d’autres domaines. Je suis persuadée que la Wallonie a de nombreuses opportunités prometteuses et qu’ensemble, nous les saisirons. »