La guerre des talents fait rage ! Remettre en question le processus de recrutement est inévitable. À défaut, la croissance d’une entreprise peut être perturbée. Romina Longo, CEO de Youphoria, nous livre ses recommandations.
Texte : Philippe Van Lil
Comment optimiser les processus de recrutement ?
« En raison de la guerre des talents, ceux-ci sont difficiles à dénicher. En conséquence, les processus de recrutement évoluent énormément. Afin d’optimaliser la quête du bon profil, il est essentiel d’utiliser un processus de recrutement automatisé et innovant. »
« Même si le lien avec l’humain reste primordial dans un tel processus, la technologie en augmente la rapidité et l’efficacité. Il est par exemple possible de préscreener et filtrer les candidats via un algorithme sophistiqué basé sur l’intelligence artificielle. On s’épargne ainsi un travail laborieux et coûteux. »
« Je suis étonnée de voir le nombre d’entreprises qui travaillent encore avec des CRM à l’ancienne. L’intelligence artificielle ne remplace pas pour autant l’expertise du recruteur ; elle sert principalement à traiter des volumes d’informations importants. Ses algorithmes permettent de lire, de trier et d’organiser la données collectées selon différents critères. »
Au-delà des technologies, que recommandez-vous d’autre ?
« Je privilégie également d’autre approches. »
« Un : ‘l’employer branding’, autrement dit la présence des sociétés sur les médias sociaux. Ne négligez pas l’importance de la présence et de la reputation en ligne. Je suis étonnée qu’à ce jour, des sociétés qui sont en pleine recherche de talents ne sont toujours pas présentes sur les réseaux sociaux pour valoriser leur visibilité auprès du grand public. »
« Deux : octroyer des incentives – honoraires, voyages, etc. – aux employés ‘ambassadeurs’ qui attirent des talents dans leur entreprise. Des employés heureux constituent de véritables ambassadeurs et porte-paroles de la société. »
Quelle erreur fréquente constatez-vous dans les recrutements ?
« En période de guerre des talents, les entreprises doivent se montrer beaucoup plus souples. Beaucoup de sociétés cherchent encore ’la perle rare’. Les employeurs doivent recruter plus largement, se montrer ouverts aux profils auxquels ils n’avaient pas pensé auparavant. »
La formation a pris une place centrale, l’évolution du monde du travail rend l’apprentissage tout au long de la vie indispensable.
« Soyons clairs : de nos jours, l’organisation n’est plus aux commandes en matière de recrutement mais bien le candidat. Il y a aujourd’hui deux fois plus de postes vacants sur le marché qu’il y a dix ans. Cela signifie qu’en tant qu’employeur, vous devez faire montre de bien plus de créativité pour attirer et retenir les bonnes personnes. »
À quelles solutions pensez-vous alors ?
« Il faut notamment être ouvert aux différents statuts : salarié comme indépendant. Les freelances offrent une véritable solution. Non seulement, ils apportent les bonnes compétences au bon moment mais, en plus, insufflent une nouvelle dynamique. Ils peuvent en effet remettre en question la culture et les processus, voire constituer des exemples de bonnes pratiques pour leurs collègues. Malheureusement, en Belgique, l’indépendant souffre encore d’idées préconçues. »
De quel genre ?
« Trop souvent, on entend encore des sociétés dire que le freelance ou l’intérim manager n’est pas impliqué comme un employé qui sera sur le payroll à long terme ou encore qu’il est trop cher. »
« C’est tout à fait faux ! Il faut tenir compte de tous les paramètres. À long terme, un intérim manager est même moins cher qu’un salarié. Vous ne le payez en effet que pour son expertise et pas pour la sécurité sociale, l’assurance maladie, la voiture de fonction, etc. »
La formation a pris une place primordiale.
« De plus, l’intérim manager n’est payé que lorsqu’il travaille ; il est directement opérationnel et n’a pas besoin de formation ; il bénéficie d’une très grande expertise et il est très flexible vis-à-vis des demandes de son client. »
Quel autre conseil donneriez-vous ?
« Dans les années à venir, beaucoup de jobs seront automatisés, d’autres disparaîtront purement et simplement, d’autres encore seront créés sans qu’on sache très bien lesquels aujourd’hui. L’expertise et le diplôme resteront bien entendu des éléments mesurables importants, mais les softs skills – non mesurables par définition – auront un rôle de plus en plus important. »
« Les employés dont les compétences ne correspondent plus à ce que recherchent les entreprises sont plus susceptibles de disparaître du marché du travail. La formation a pris une place primordiale. Nous devons encourager les gens à apprendre davantage tout au long de leur vie. Sur ce point, la responsabilité est partagée entre l’employeur et l’employé. »